30 ans de Honda Fireblade

RIDING THE BLADE

La CBR900 RR a été lancée en 1992 et a totalement changé la manière de conceptionner et d'utiliser une moto sportive. A ce titre, il s'agit de l'une des machines les plus importantes de l'histoire et 30 ans après son apparition, la Fireblade demeure une icône au sein de la gamme Honda.

La Honda CB750 Four est généralement considérée comme l'ancêtre de toutes les motos sportives. Mais c'est sans doute aller un peu vite en besogne… Après tout, c'est la FireBlade qui, plus de deux décennies après la CB, a vraiment révolutionné le monde de la moto sportive. Alors que la CB750 a rapidement dû faire face à la concurrence face à d'autres machines japonaises – dont le développement a été achevé un peu plus tard que celui de la Honda - la Blade première du nom est restée sans concurrence pendant une demi-douzaine d'années. Kawasaki, par exemple, avait une 750 fin prête en 1968, mais comme il s'est fait coiffer sur le fil par Honda, il a décidé d'en faire une 900. Reste qu'en deux ou trois ans, la CB 750 a vu arrivé une sérieuse concurrence. Cela n'a pas été le cas de la Fireblade.

Sans concurrence

Il a fallu attendre 6 ans pour qu'une autre marque apporte une réponse à la révolution initiée par Honda. Même si la R1 de 1998 était plus rapide, plus légère et plus puissante que la Blade, il faut bien reconnaître que Yamaha n'a fait qu'améliorer ce que Honda avait fait avec la Blade, soit obtenir plus de puissance avec moins de cm3 et réduire le poids. C'est précisément cette recette, associée à un châssis de haut niveau et à un design très réussi, qui a été la clé du succès de la Blade. Et c'est bien cette moto qui a jeté les bases de toutes les sportives ultérieures.

No Bad Boy

120 ch et 185 kg, voilà des valeurs qu'on ne peut plus considérer comme extrêmes aujourd'hui. En 1992, il en allait tout autrement. A l'époque, la Blade a fait couler beaucoup d'encre. Les journalistes, au retour de la présentation de presse internationale à Philip Island, n'ont parlé que de roue avant délestée et de caractère extrême. En bonne partie pour se faire valoir personnellement. Mais cela a aussi donné à la Fireblade une image de "bad boy". Bien à tort, parce que Baba San, le père spirituel de la Blade, a adhéré au principe du contrôle total pendant des années. Honda ne l'a délaissé que 6 ans. Tout simplement parce qu'en 2022 (et c'est le cas depuis plusieurs années), les motos très sportives n'ont plus besoin d'être polyvalentes, puisqu'elles sont jugées sur base d'une seule chose: leur temps au tour. Et cela donne des monstres de puissance qui ne peuvent être utilisés ou appréciés que par un public restreint. La dernière version en date de la Fireblade ressemble toujours à la moto d'il y a 30 ans, mais tant en termes de technologie que de concept, ces motos n'ont plus rien en commun.

Retour aux origines

Honda a débarqué en Europe dans les années 1960 et, parmi les multiples possibilités qui lui étaient offertes, elle a choisi la ville belge d'Alost pour y établir son siège social. Au Wijngaardveld à Alost, se trouvent toujours les bureaux de Honda Europe et du HRC. Mais l'approvisionnement logistique se fait à partir du port de Gand, à un (long…) jet de pierre de là. C'est là aussi que les Fireblade destinées au continent européen ont débarqué en 1992. Tout comme notre moto d'essai. Nous nous sommes dit que ce serait une bonne idée de nous rendre au port de Gand dans le cadre de cet essai et de ramener la Blade 92 à l'endroit même où elle est arrivée en Europe voici 30 ans. Et en plus, ce fut une belle balade… Happy 30th anniversary, Blade!

Signal d'alarme

Jusqu'en 1998, très peu de choses ont changé pour le vaisseau amiral de Honda. On peut d'ailleurs dire que la marque s'est un peu reposée sur ses lauriers et n'a pas vu venir la concurrence. La Yamaha R1 a été un signal d'alarme auquel Honda a réagi de façon quelque peu tardive. À partir de 2000, la Fireblade est devenue plus compétitive et plus extrême, mais le concept de contrôle total a été conservé. La Fireblade est restée un succès et a accédé au rang d'icône, mais les ventes du début des années 90 n'ont pas été égalées. C'était logique, compte tenu de la concurrence et du niveau d'innovation dans le secteur. Mais ce que la première Fireblade a fait en 1992, aucune autre moto de sport ne l'a fait depuis lors. Si Honda dévoile sa CBR 1000 RR SP 2022 dans une livrée inspirée de celle de 1992, c'est donc tout sauf un hasard.

Au guidon d'un modèle 1992 en 2022

En 1998, lors d'un essai comparatif entre la Yamaha YZF-R1 et la CBR900RR Fireblade, le pilote de vitesse pure Louis Wuyts, également pilote d'essai à l'époque, écrivait dans le magazine MotorWeek : "Cette Fireblade, c'est presque une moto de tourisme". Venant de la bouche d'un homme qui allait remporter 18 titres nationaux, cette déclaration a été accueillie avec un certain scepticisme. Mais en prenant aujourd'hui le guidon de cette Fireblade 1992, nous pensons que les mots de Louis Wuyts contiennent une bonne part de vérité. Ce qui était considéré comme extrême à l'époque, ne l'était pas en réalité. Ce concept de contrôle total était plus qu'un slogan. La position de conduite sur la Blade originelle était très confortable. Notre moto d'essai est en parfait état d'origine et tout fonctionne comme il faut. Au début, le 4-en-ligne recherche une peu son souffle quand on ouvre brusquement les gaz à bas régime, mais au bout d'une demi-heure, la Blade tourne rond. Mettez donc de l'essence fraîche dans le réservoir et le caractère du moteur ne tardera pas à se manifester!

Meilleure qua naguère

La Blade fait preuve d'un caractère plutôt accommodant, mais avec une puissance très bien répartie et un joli punch à haut régime. Sur une longue ligne droite, la moto grimpe sans tarder vers les 200 km/h. Sur les routes sinueuses, le comportement est très précis et c'est franchement un plaisir de prendre à nouveau les virages avec une roue avant de 16". Difficile de comparer avec le modèle 1992, mais chaussée de pneus sport Bridgestone S21, il est possible que la Blade tienne mieux la route aujourd'hui qu'à l'époque. D'autant plus que la moto était alors équipée de série de Michelin Macadam, des enveloppes que refuseraient aujourd'hui même de nombreux motards de tourisme. Les pneumatiques modernes ne font donc pas de mal à notre Blade. Tout fonctionne encore à merveille sur notre moto d'essai. Les témoins lumineux des clignotants sont toujours fonctionnels et les deux cadrans du tableau de bord renseignent toujours avec précision la vitesse et le régime moteur. Seul le starter manuel ne reste plus ouvert automatiquement, ce qui oblige à le maintenir pendant une minute ou deux lors des démarrages à froid.